Les enfants à haut potentiel intellectuels interrogent et constituent un défi éducatif et social à la fois pour les chercheurs, les professionnels de la santé, de l’éducation et les parents souvent démunis.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’un handicap ou d’une pathologie, cette spécificité peut entraîner des troubles de l’apprentissage et une souffrance psychologique malgré des capacités certaines. Cette “façon d’être au monde” touche 2,3% de la population scolaire. Mais comment définir ce haut potentiel ?
Selon le chercheur américain J. Renzulli, ce haut potentiel combine trois composantes :
des aptitudes intellectuelles au-dessus de la moyenne
l’engagement dans la tâche (motivation, enthousiasme et persévérance)
la créativité (flexibilité, originalité de la pensée, ouverture aux expériences nouvelles)
Faut-il considérer ce haut potentiel comme un don, un talent, une capacité à produire des idées originales, nouvelles et adaptées dans un contexte ?
Selon T. Lubart, spécialiste de la créativité, les enseignements artistiques ou esthétiques peuvent être un lieu d’épanouissement pour ces enfants. Il recommande d’ailleurs de mettre en place très tôt des activités axée sur la créativité pour un repérage et un diagnostic plus rapides.
Mais comment améliorer la prise en charge pédagogique de ces enfants ? Selon le CNAHP, l’unique centre en France consacré aux enfants et aux adolescents à fort potentiel, il est important de maintenir la motivation de ces enfants en mettant en place des techniques d’apprentissage centrées sur la méthodologie et diverses mesures d’ajustements scolaires : programme d’enrichissement, décloisonnement pédagogique, saut de classe, pédagogie différenciée ou alternative… Cela permet de limiter le décrochage scolaire, la perte de motivation ou l’anxiété menant à l’échec.
Néanmoins, malgré les efforts effectués par certaines académies, le manque d’engagement politique sur cette question reste un véritable enjeu sociétal.
Dans la chronique scientifique de la radio RTS, Silvio Dolzan est revenu sur l’apprentissage de l’écriture dans l’ère numérique actuelle.
Nous sommes tous passés par là dès notre plus jeune âge. Stylo à la main, nous avons chacun appris l’écriture cursive à l’école en apprenant notamment à reconnaître les lettres que nous écrivions. C’est cet apprentissage de l’écriture qui nous ouvre ensuite les portes de la lecture. Néanmoins, à l’ère du numérique, l’enfant devenu adulte délaisse son stylo pour le clavier. Clavier qu’il peut utiliser toute la journée voire toute sa vie selon les métiers. Jean-Luc Velay, chercheur CNRS en neurosciences cognitives à l’Université Aix-Marseille s’est donc interrogé sur de nouvelles méthodes possibles d’apprentissage via le numérique et sur leur efficacité en les comparant avec les méthodes traditionnelles.
D’après une étude menée pendant plusieurs semaines sur deux groupes d’enfants, la bonne vieille méthode d’apprentissage resterait la plus efficace. L’un des groupes apprenait des lettres par la méthode cursive alors que l’autre les apprenait grâce au clavier. Le résultat est sans appel. Les enfants ayant eu recours à l’écriture cursive ont beaucoup mieux assimilé les lettres qu’ils écrivaient que les enfants utilisant le clavier.
La même étude a ensuite été réalisée sur des adultes avec des caractères qu’ils ne connaissaient pas. Les résultats obtenus ont été les mêmes. La conclusion de ces expériences est que le fait d’apprendre à écrire les lettres à la main permet de créer une mémoire motrice qui se réactive tout au long de la vie de l’enfant puis de l’adulte dès qu’il doit apprendre un nouveau symbole ou caractère.
La méthode traditionnelle d’apprentissage de l’écriture cursive semble donc encore montrer son efficacité face aux nouvelles technologies.
Pour organiser ses idées, chacun à sa méthode. Certains préfèrent écrire sur un carnet, d’autres sur un tableau. Vous savez probablement déjà qu’Amifor est un fervent utilisateur de la carte mentale.
La carte mentale est un excellent moyen de visualiser et d’organiser l’intégralité de ses idées. Vous pouvez les hiérarchiser de façon logique et leur attribuer un code couleur pour les plus visuels d’entres nous. La carte mentale, appelée aussi mindmap, carte heuristique, carte des idées ou carte cognitive, permet aussi de stimuler efficacement sa créativité. Elle fait très souvent l’objet des formations proposées par notre centre de formation. Elle est adaptée aux plus petits comme aux plus grands.
Pour les débutants dans ce domaine, il existe plusieurs alternatives pour s’y essayer facilement. Tout d’abord le logiciel Xmind, un logiciel gratuit et pratique. Il existe aussi l’outil en ligne Text2MindMap, gratuit lui aussi et très simple à prendre en main.
Vous pouvez observer ci-dessus un début de carte mentale sur notre centre de formation, Amifor. Elle est organisée selon nos publics et selon les grandes thématiques de formations que nous leur proposons.
Dans une interview accordée à la radio Europe 1, le médecin nutritionniste, Jacques Fricker, nous donne des conseils sur quels aliments privilégier pour améliorer nos capacités mémoristiques.
Veiller à préserver sa mémoire en choisissant un menu adapté devrait être une préoccupation importante pour nous car cela permet aussi de se prémunir contre les maladies neurodégénératives comme Alzheimer. “La mémoire est liée en grande partie à une structure qu’on appelle l’hipppocampe. C’est la seule structure où les cellules nerveuses peuvent se régénérer, même après 30 ou 40 ans. Les liaisons entre les différents neurones dépendent de l’alimentation. Il y a des aliments protecteurs, et d’autres qui sont néfastes”, explique le spécialiste.
De ce fait, le nutritionniste préconise des aliments riches en polyphénols (une molécule protectrice) comme les fruits et légumes ou encore le chocolat, le café ou le thé. Toujours selon Jacques Fricker, le cerveau a aussi besoin d’oméga 3 que l’on retrouve dans les poissons gras (thon, saumon, sardine) les noix, ou l’huile de colza. Un menu à compléter avec du pain de seigle, du pain complet ou des flocons d’avoine.
Du côté des avertissements, le médecin nous met en garde contre les boissons sucrées et les graisses saturées (frites, charcuterie) qui sont selon lui des “ennemis de la mémoire”.
Préserver sa mémoire est très important alors rappelons-nous en !
Au Canada, Marielle Bonneau, conseillère pédagogique et orthopédagogue, s’est lancée dans un nouveau projet de recherches pour prouver que tous les enfants sont capables d’apprendre et que le personnel enseignant détient le pouvoir de développer leur intelligence.
Ce nouveau projet consiste à apprendre aux élèves le fonctionnement de leur cerveau pour leur permettre de se concentrer sur une tâche, mémoriser des informations, trouver des stratégies pour obtenir des résultats et réguler leurs émotions. A l’aide d’images et de métaphores, l’enfant parvient à comprendre comment son cerveau fonctionne et peut par conséquent identifier ce qui ne va pas.
Pour prouver ses dires, M. Bonneau a par exemple fait comprendre à un enfant qu’il dérangeait toute sa classe en le munissant d’une lampe frontale qu’il braquait dans tous les sens. Les ateliers «À la découverte de mon cerveau» ont été élaborés avec toute une équipe d’orthopédagogues et de conseillères pédagogiques de la Commission scolaire des Bois-Francs (Québec) avec la contribution des profs qui acceptent de les animer.
L’important maintenant pour mesurer l’efficacité de ces ateliers est de comparer les résultats de deux classes. L’une ayant participé à ces ateliers et l’autre non. Tant du côté des élèves que des professeurs. M. Bonneau précise que pour que ces ateliers soient efficaces, chacun doit y mettre du sien, y compris les professeurs et les parents. Ils doivent réinvestir les connaissances et le vocabulaire avec l’enfant. S’organiser, planifier, mémoriser, concentrer son attention constituent des clés pour apprendre.
Ses travaux comment à avoir un écho jusqu’en Normandie. Particulièrement auprès de Sandrine Rossi, maître de conférences en psychologie cognitive de l’Université Caen. Cette dernière souhaite s’associer aux résultats de la conseillère pédagogique pour valider le résultat de ses recherches en dépistage précoce chez les petits du préscolaire. Deux classes de pré-maternelles seront choisies l’an prochain pour expérimenter cette méthode.
Pour terminer, Marielle Bonneau insiste vraiment sur le rôle essentiel des parents, qui peuvent être considérés comme des guides pour leurs enfants. Jouer avec son enfant, c’est une manière d’être entièrement présent à lui, de lui permettre de développer des stratégies, de stimuler ses capacités d’apprendre.
Du 12 au 18 mars, se déroule la 20e édition de la Semaine du Cerveau. Dans une quarantaine de villes de France, des chercheurs proposent gratuitement au grand public conférences, expositions, visites et ateliers pour mieux comprendre cet organe fascinant…
Depuis 20 ans, pas de mois de mars sans sa Semaine du Cerveau ! Des chercheurs issus de grands organismes de recherche, et du monde médical proposent gratuitement, dans toute la France, des évènements en lien avec les neurosciences, conçus à destination du grand public. Débats, spectacles, expositions, conférences, ateliers, visites de laboratoires… les curieux ont l’embarras du choix !
Environ la moitié des initiatives est proposée en milieu scolaire, l’autre étant ouverte à tous les publics. À chaque ville sa programmation et ses chercheurs ! Ce soir, des spécialistes du rêve, de l’intelligence artificielle, de l’apprentissage ou du vieillissement cérébral vous attendent peut-être dans leurs locaux, dans une salle municipale… ou même dans un bar ! L’ensemble de ces propositions est détaillée, département par département, sur le site SemaineDuCerveau.fr
L’initiative est motivée “par la volonté de partager les connaissances générées par la recherche sur le cerveau et de rendre accessible à tous la démarche et la culture scientifique”, explique Lydia Kerkerian-Le Goff, présidente de la Société des Neurosciences, qui coordonne l’événement en France. Les avancées de la recherche méritent, selon elles, d’être mieux médiatisées.
“Étudier le fonctionnement du cerveau à toutes les étapes de la vie, et par de multiples approches, est essentiel pour comprendre nos comportements, nos prises de décision et l’influence de notre environnement, avec des implications majeures pour notre société”, poursuit-elle. “Cela est également fondamental pour combattre les maladies du système nerveux qui affectent plus de 160 millions de personnes en Europe et dont l’impact économique et sociétal est énorme.”
Selon les responsables de l’événement, plus de 40.000 personnes ont participé aux conférences et ateliers proposés sur le territoire.
A l’école Sainte-Thérèse à Ans (Belgique) , le jeu d’échecs été intégré dans l’apprentissage des enfants. Chaque semaine, les élèves consacrent une période à ce jeu de stratégie.
Rapidement, nous avons été bluffés par l’ampleur extraordinaire prise par ce projet. Les enfants de toute origine, de tout âge et tout milieu se sont fédérés autour d’un même but : maîtriser un jeu d’intelligence commun à toute l’école!
Aujourd’hui, nombreux d’entre eux ont acheté un jeu à la maison pour jouer avec leur famille, ce qui a poussé certains parents à entrer dans notre école et à participer à des temps de jeu avec les élèves.
En formant les élèves, mais aussi les enseignants à la stratégie du jeu d’échecs et à les intégrer dans les apprentissages (quadrillages, déplacements, dictées…), cela a permis à de nombreux enfants en difficultés scolaires de prendre conscience de leur potentiel intellectuel (stratégie, mémorisation…) dans un contexte de jeu et ainsi augmenter leur confiance en eux. Certains plus “hyperactifs” ont appris à se canaliser, à gérer leur attention sur une tâche qui sollicite toute leur réflexion.
D’un autre côté et avec un impact aussi important qu’inattendu, ce projet a permis aux enfants de développer tout un lot de compétences dans leur relation avec les autres. En effet, en jouant aux échecs une heure par semaine, mais aussi pendant les récréations, les temps ouverts, beaucoup d’enfants ont appris à se canaliser, à discuter et à respecter l’autre, à accepter des règles communes, etc.
En confrontant, nos activités avec nos amis les Octofun, nous nous sommes rendu compte que le jeu d’échecs en développe 6 sur 8.
Concrètement, après une année d’apprentissage tant à partir de logiciels que de moments de jeu en classe, les élèves maîtrisent la marche des pièces, comment mettre mat et le pat. Aujourd’hui, ils entrent dans une phase plus stratégique avec des discussions sur les ouvertures, mat en 1 coup, etc.
Pour conclure, voici quelques réflexions d’enseignants de l’école Sainte-Thérèse notées en cours de route qui résument notre projet.
Les échecs développent l’esprit scientifique.
Ce jeu est motivant pour les élèves.
Le temps des parties est adapté au temps scolaire.
Ça les aide à se concentrer.
Le jeu et ses histoires de bataille fascinent les élèves.
Certains élèves ont repris confiance en eux.
C’est un projet “bon marché”.
Le jeu les aide à développer leur mémoire et leur pensée logique.
Cela favorise l’imagination et la capacité à anticiper.
Les échecs leur enseignent l’indépendance et à vivre ensemble en respectant des règles communes.
Les élèves adorent ce cours, c’est un moment à la fois de détente et de réflexion intense
Amifor® dispense des formations autour des intelligences multiples.
Intelligences multiples et enseignement, et également intelligences multiples en entreprise. Recrutement, projet, reconversion professionnelle. Voici les différents contextes dans lesquels la théorie de Gartner semble évidemment efficace.
Dernièrement cependant, je recevais en formation sur cette thématique un agent commercial qui était venu chercher une solution “intelligences multiples” bien différentes :
“Peut on avoir une démarche commerciale différenciée en fonction du profil acheteur que l’on a en face de soi ? “.
Situation complexe, si on a pas le temps d’observer suffisamment son interlocuteur. Comment deviner avec quelle intelligence peut il raisonner, apprendre, comprendre ?
Mais le défi était intéressant et notre petit groupe s’est donc attelé à la tâche. Nous vous proposons ci joint une carte mentale que nous pourrions intituler ” INTELLIGENCES MULTIPLES ET TECHNIQUES DE VENTE”. Imparfaite certes, mais elle offre quelques astuces, pour “rentrer dans le cercle intime de son interlocuteur”.
Vos commentaires sont les bien venus !
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Les politiciens sauront ils donner une forme légale à ces travaux scientifiques et à ces débats de société?
La moindre découverte technique bouleverse l’idée qu’on se fait de soi, ce qui enchante les uns et effraye les autres. Ces deux réactions opposées sont pourtant légitimes, car toute innovation a des effets secondaires, bénéfiques et maléfiques.
La découverte des Chopper, ces galets tranchants de l’époque pré-acheuléenne a modifié la manière de vivre en groupe. En découpant la viande et en raclant les peaux pour en faire des vêtements, on hiérarchisait le groupe. On mettait au sommet les costauds capables de tuer un animal, et les spécialistes qui savaient transformer le gibier en objets techniques, en poinçons pour coudre les peaux ou en collier de dents pour décorer le corps. Les hommes faibles, les incompétents se contentaient des restes.
Si les Mongols sont arrivés aux portes de Vienne en 1241, en écrasant les armées occidentales et en détruisant les villes, c’est en grande partie grâce à l’usage de l’étrier qui permettait à ces petits guerriers de tenir à cheval, de tournoyer à toute allure en lançant des flèches aux gros Teutons, caparaçonnés mais instables sur leurs appuis.
Quand le blocage hormonal de l’ovulation chez les lapines fut découvert en 1929 par deux endocrinologues, cette trouvaille biologique a bouleversé la condition des femmes et l’organisation des sociétés. Les débats fiévreux qui ont suivi entremêlaient les données scientifiques avec des wagons de fantasmes. Beaucoup pensaient que si le ventre des femmes n’appartenait plus à l’État, elles allaient se prostituer pour gagner quelque monnaie. Les femmes, elles pensaient qu’en maitrisant leur fécondité, elles pouvaient désormais tenter l’aventure du développement personnel. Après 40 ans de débat en France, quand la “pilule” fut rendue légale, les féministes possédaient un solide argument.
En 1960, Alain Reinberg démontrait que les rythmes scolaires (leçons d’une heure, grandes vacances de trois mois, lever précoce) étaient tellement dissociés des rythmes biologiques de l’apprentissage, que l’école freinait l’acquisition des connaissances!
En 2017, l’explosion des neuro-sciences pose des problèmes passionnants et terrifiants. Les chercheurs et praticiens se servent de photos de scanners et de films de résonance magnétique (RMI) pour mieux soigner, pour voir comment travaille un cerveau et analyser la mise en place de troubles du développement. Parfois, ils s’effrayent des interprétations abusives et du risque d’emprise des neuro-sciences qui imposeraient à la société des conditions uniquement techniques d’élevage des enfants.
Depuis l’âge du silex taillé, ces attitudes opposées sont inévitables et nécessaires.
En 1954 j’étais à Bucarest à l’époque de Georghiu Dedj avant Ceaucescu. Visitant la Faculté de Médecine, j’ai vu des banderoles où l’on pouvait lire: “Le chromosome est une invention bourgeoise destinée à légitimer le capital.” Les étudiants qui en parlaient étaient collés à l’examen. Dans les années 1970, en France, de nombreuses publications décrivaient le “chromosome du crime” où l’on pouvait constater cliniquement que des hommes grands, chauves et timides étaient particulièrement nombreux dans la population des criminels emprisonnés et des services de psychiatrie fermée. L’utilisation des connaissances génétiques affirmait qu’ils étaient porteurs d’un gène, proche de “l’x” fragile qui les rendait impulsifs jusqu’au crime.
Le grand public était séduit par ces explications scientifiques. Sur le terrain des hôpitaux, j’étais entouré de psychiatres et de psychologues ulcérés par la notion de “programme génétique”. “L’homme n’est pas une machine” criaient-ils, indignés. Sauf que, à la même époque, je me souviens de réunions à la SFECA (Société Française d’Études du Comportement Animal) où des généticiens comme Roubertoux et Carlier, ne parlaient jamais de programme génétique. Ils travaillaient déjà à la notion d’épigénèse en démontrant qu’un alphabet génétique élémentaire, composé de quelques lettres, pouvait écrire mille romans différents, selon les pressions du milieu.
En 1983, dans l’ile des Embiez, près de Toulon, nous avions organisé avec Jacques Petit et Pierre Pascal, un des tout premiers colloque sur les interactions précoces qui étudiaient comment un fœtus, après la 27e semaine et un bébé pré-verbal, avant le 20e mois, entraient en relation avec son entourage. Dans la salle, les psychanalystes suffoquaient de rage. Bernard This, très apprécié dans ce milieu, s’est écrié: “Vous êtes des médecins nazis! Vous faites des expérimentations sur les bébés, vous les considérez comme des objets de sciences alors que ce sont des personnes! Vous les chosifiez!” L’évolution des idées a démontré que, au contraire, ce sont les expérimentations scientifiques qui ont mené à découvrir le monde mental des nouveau-nés. À la Faculté de Médecine, des universitaires enseignaient que “tant qu’un enfant ne parle pas, il ne peut rien comprendre”. Marie-Claire Busnel, Denis Querleu, Herbinet et d’autres chercheurs de laboratoire, associés à des praticiens fournissaient des documents qui ont justifié le succès du très beau film de B. Martino “Le bébé est une personne” (1984) inspiré de Françoise Dolto et de R.J. Bouyer “Les mémoires d’un bébé” (2009) plus proche de l’éthologie humaine.
Comment comprendre cette avalanche de contresens entre les scientifiques, les gens de terrain et la culture du grand public? Il me semble que ces erreurs d’interprétation témoignent d’un trouble de la communication. Dans notre culture occidentale, la fragmentation du savoir mène au pouvoir. Si vous souhaitez obtenir le prix Nobel, faites des publications de carrière, formatées, ennuyeuses, (parfois éblouissantes) qui permettront de plaire à ceux qui ont le pouvoir de reconnaitre leurs pairs. Si vous préférez soigner, vous lirez ces publications que vos patients valideront ou invalideront selon leurs réactions. Et si vous êtes simplement parent ou consommateur de culture, comme tout un chacun, vous interpréterez ces données scientifiques et cliniques selon vos désirs. Si vous avez un appétit pour les explications organicistes, vous éprouverez du plaisir en disant que les neuro-sciences vont tout expliquer et qu’il suffit de les appliquer pour que les enfants se développent bien. En parlant ainsi vous provoquerez l’hostilité de ceux qui ont soif de relations humaines et d’immatérialité. Ceux là éprouvent les neuro-sciences comme une tentative d’emprise, ou comme une usurpation.
Ces désirs opposés ont raison tous les deux. Les images d’IRM en donnant des certitudes, créent une illusion de vérité car, moins on a de connaissances, plus on a de certitudes! Les chercheurs de laboratoire créent des situations expérimentales qui sculptent des atrophies cérébrales ou les réparent. Ils posent ainsi des problèmes passionnants qui ne sont que des croyances momentanées. Sur le terrain, les praticiens avec leurs scanners de ville photographient des milliers d’atrophies cérébrales dont ils ne font aucune publication mais qui, associées aux travaux expérimentaux prennent parfois, pour eux, une valeur explicative.
Certains sociologues, psychanalystes ou littéraires qui ne savent pas lire ces images entendent des interprétations qui alimentent les stéréotypes culturels. Ils appellent ces histoires “neuroblabla”. Ils savent que le cerveau se situe dans la moitié supérieure du corps, mais ils ne peuvent pas imaginer qu’un enfant aveugle de naissance ou malvoyant parce qu’il vit dans un milieu de pénombre, sculpte un cerveau façonné par cette défaillance. Le déficit peut être neuro-sensoriel d’origine individuelle (cécité), autant qu’environnemental (pénombre). En rétablissant l’homéostasie de la communication, le cerveau d’un tel enfant surentraîne d’autres voies de communication auditive ou olfactive. Si bien que lorsqu’il palpe un objet pour le connaitre, ce n’est pas la zone pariétale habituellement consacrée au toucher qui va fonctionner, c’est la zone occipitale qui traite les informations lumineuses et leur donne la forme d’une image. Un enfant sculpté par une défaillance visuelle apprend donc à voir avec ses oreilles, avec son nez et ses doigts. Pour un praticien cette donnée scientifique offre une possibilité d’éducation des malvoyants. On peut lui apprendre à se déplacer en ville avec l’aide de l’audition et à lire un essai philosophique écrit en braille. Une telle donnée neuro-scientifique est un cadeau pour le praticien (médecin ou enseignant) qui désire aider un enfant.
De nombreux travaux issus des théories de l’attachement démontrent comment un nouveau né placé dans une niche sensorielle pauvre, altère le développement de ses capacités cognitives. Tout apprentissage, pour lui, sera laborieux et pénible, puisque son cerveau n’aura pas été entraîné à traiter ces informations. Un tel enfant se sentira agressé par le premier jour d’école, au point de manifester un petit syndrome psychotraumatique (énurésie, encoprésie, refus alimentaire, insomnie, repli sur soi et agressivité). Ces altérations de fonctionnement ne sont pas dues à une mauvaise qualité cérébrale, elles sont attribuables à une défaillance environnementale: mort de la mère, violence conjugale ou précarité sociale. Ces déterminants hétérogènes provoquent un dysfonctionnement cognitif qui, s’il n’est pas résilié, risque de faire d’un tel enfant, un futur mauvais élève.
Un praticien peut admettre un tel raisonnement systémique, mais d’autres chercheurs coupés de la matière, parlent de “neuroblabla” parce que leur cheminement de carrière ne les a pas entrainés à un recueil d’informations pluridisciplinaires.
Pour déclencher un processus résilient, il faut agir sur le sous système défaillant: donner un substitut affectif si la mère est morte ou malade, apaiser la violence conjugale, proposer une école adaptée aux besoins de l’enfant, lutter contre la précarité sociale et bien sûr, empêcher la guerre.
On a pourtant raison de se méfier du neuroblabla car, au nom de la science, on a souvent provoqué des effets pervers. Ce n’est pas la science qui est remise en cause, c’est son effet-discours, c’est l’implicite idéologique que contient toute publication scientifique. Quand la médecine a été couronnée de succès au début du XXe siècle, elle était tellement convaincante qu’elle est devenue totalement explicative. On a dit que la folie et les troubles du développement étaient attribuables à des microbes ou à des intoxications cérébrales. La méningite syphilitique ou tuberculeuse, la folie urémique ou le crétinisme des Alpes étaient des maladies bien identifiées qui, depuis sont bien soignées. Les antibiotiques, l’épuration extra-rénale, l’addition d’iode dans le sel de table ont guéri ces troubles psychiques. Ce sont les progrès de la médecine qui ont disqualifié le modèle médical des troubles psychiatriques. Alors certains ont pris l’habitude de faire confiance aux savoirs médicaux. Ils demandent de trouver la cause médicale des mauvais résultats scolaires, ce qui est parfois pertinent et la plupart du temps absurde.
L’implicite de la découverte des chromosomes et des gènes donnaient une impression de déterminisme biologique héréditaire inexorable. Les scientifiques qui découvraient l’importance des pressions environnementales qui façonnent le cerveau s’opposaient à la doxa. Ils offraient pourtant un degré de liberté, puisque les politiciens pouvaient en tenir compte et agir sur le milieu qui agit sur nos enfants. Lyssenko, ami de Staline s’est opposé à la découverte des chromosomes, alors que les nazis y ont trouvé un argument pour légitimer le racisme. Les éleveurs, en sélectionnant les gamètes des parents renforçaient la théorie de la race, et Émile Zola illustrait, dans les Rougon-Macquart, l’hérédo dégénérescence de cette famille. Une vérité partielle venait de se transformer en biologie imaginaire où certains politiciens trouvaient une source de décisions tragiques. Même les mathématiques furent utilisés pour alimenter cette idéologie qui moralisait le crime en parlant d’hygiène sociale ou d’épuration des sociétés. Dans les écoles, les instituteurs demandaient aux enfants d’évaluer le coût de l’entretien d’un débile. Connaissant le prix d’un appartement, les élèves devaient calculer combien de couples de beaux jeunes gens étaient privés de logement à cause de l’entretien de la vie sans valeur d’un retardé mental. Pour éviter de telles dérives, il est nécessaire que les politiciens organisent des lieux de rencontre entre les scientifiques, les philosophes et les artistes.
L’école a toujours participé à la hiérarchie sociale. Dans la Grèce ancienne, les élèves apprenaient les gestes et la rhétorique qui les aidaient à mieux se reconnaitre afin de se partager les biens et les responsabilités.
Dans les années d’après-guerre, l’école se contentait d’apprendre à lire, écrire et compter avec des méthodes éducatives parfois brutales, dont les enfants souffraient peu, puisque l’école était brève et qu’à l’âge de 12 ans, ils apprenaient presque tous, un métier manuel.
Aujourd’hui l’école devient le principal organisateur social, mais les enfants sont plus lourds car, à cause des progrès technologiques, ils ne deviennent indépendants que vers l’âge de 26-28 ans. Les processus d’apprentissage, plus variés et compliqués nécessitent l’apport des neuro-sciences. Notre ministre Jean Michel Blanquert a donc demandé à Stanislas Dehaene de préciser ce domaine. Il suffit de regarder la composition de son conseil scientifique pour savoir que ce groupe dira que les neuro-sciences sont nécessaires dans les métiers de l’éducation, mais qu’elles ne doivent pas avoir le monopole des explications puisque travaillent ensemble des philosophes, des linguistes et des sociologues qui se méfieront de l’emprise des neuro-sciences.
Le ministre de l’éducation a aussi demandé à votre serviteur de réfléchir à l’école maternelle. J’ai rassemblé une équipe de chercheurs et de praticiens qui défendront l’idée que la maternelle constitue le fondement affectif du plaisir d’apprendre. Le petit, désireux d’explorer son monde, ne peut le faire que lorsqu’il est sécurisé. Il a encore besoin d’une niche sensorielle, affective, composée de quelques figures d’attachement : la mère bien sûr, mais aussi le père, la fratrie, les compagnons de crèche, et les métiers d’accueil de la petite enfance. Les petits ne s’attachent pas forcément à celle (celui) qui a le plus de diplômes, il faudra donc tenir compte de l’importance de ces accueillantes désireuses d’acquérir des connaissances et leur donner une reconnaissance sociale.
Les travaux sur l’attachement fournissent un recueil de données scientifiques où les neuro-sciences s’harmonisent avec les travaux de psychologues, de sociologues et d’artistes, pour expliquer comment l’acquisition d’une confiance en soi, donne aux enfants le bonheur d’apprendre.
Les politiciens sauront ils donner une forme légale à ces travaux scientifiques et à ces débats de société?
Boris Cyrulnik Neurologue, psychiatre, éthologue et psychanalyste